Texte de Ketriken – « Le bruit du bonheur » *

L’église du village est pleine à craquer. Certes, elle n’est pas très grande, mais en ce 12 juin 1965, c’est jour de communion. Tous les paroissiens sont là qu’ils aient ou pas des enfants en âge de recevoir les saints sacrements, car on fête Dieu, on Lui confie l’âme des enfants (une fois de plus, car il y a déjà eu le baptême tout de même, mais c’était il y a longtemps, ça peut pas faire de mal de Lui refaire un petit signe…) et cerise sur le gâteau on est invité chez les voisins ou dans la famille pour faire bombance. Chacun et chacune s’est endimanché, a glissé le vieux missel dans le sac ou au fond d’une poche de veste, a bien vérifié disposer de quelques pièces de monnaie pour la quête, et c’est parti pour une belle journée à ne rien faire. Merci, mon Dieu, merci !

Seigneur Jésus, que toute cette mise en scène est longuette. On entend des gorges qui raclent, des petits qui s’impatientent, des chaises qui crissent sur le carrelage, mais on fait l’effort d’attendre quand même. L’abbé Gilet n’a pas pu se retenir de faire son a capella traditionnel sur on ne sait quel psaume, dont on a vaguement compris qu’il fallait partager ou pardonner, quelques alléluias par-ci par-là et c’est à chaque fois un déchirement pour les tympans. Plus les années passent et pire c’est, la marge de progression est inexistante, par contre la marge de régression (si ça existe) se confirme. Bah ! les petits et petites communiants et communiantes ont l’air ravis. Ils opèrent consciencieusement leur chorégraphie sous les yeux attendris de la famille et des fiers parrains et marraines. Madame Lambert assise au quatrième rang tique un peu, car son attention est retenue depuis quelques minutes par le profil gauche du curé. Elle profite du léger chahut provoqué par le regroupement des enfants dans l’allée principale et se penche vers sa voisine :
« Il a quoi sur sa figure le curé ? » chuchote-t-elle à l’oreille de madame Rambourg
Madame Rambourg se penche un peu pour mieux voir entre les têtes des premiers rangs. Le curé est en train de distribuer l’hostie aux communiants et communiantes. Une longue file d’aubes blanches s’étire dans l’église, puis chaque enfant prend place devant l’hôtel en ouvrant des bouches grandes comme des fours pour recevoir « le corps du Christ, amen ». Madame Rambourg se tortille encore un peu sur sa chaise, et oui, en effet elle voit bien que l’abbé Gilet à un pansement près de l’œil gauche. Il s’est cogné ? Il est tombé ? Il ne se serait pas battu tout de même.
Elle se tourne vers madame Lambert et lève les sourcils en même temps que les épaules. Elle n’en sait fichtre rien.

La veille de ce dimanche de communion, Marie est très contrariée et marche à grandes enjambées dans la ruelle de l’église. Chaque pas s’assortit du bruit de la claquette qui remonte d’un coup sec contre le talon : et clac, et clac, et clac, en rythme soutenu et régulier tel un véritable métronome. C’est le début de l’été, en plein après-midi et on crève de chaud. Sa longue et jolie robe cache-cœur de coton s’entrouvre sur le bas de ses jambes à chaque pas. Elle tient solidement la petite Madeleine par la main qui du haut de ses 4 ans peine à suivre le rythme bien trop rapide de sa mère. La petite fait bien ce qu’elle peut pour rester à la hauteur, mais se sent soulevée, puis tirée, emmenée par le mouvement, alors elle rechigne bien un peu, pédale parfois dans le vide, entend le bruit des pointes de ses sandales qui frottent l’asphalte frrrt, frrrt, frrrt.., et n’apprécie guère de sentir son bras tendu et maintenu si fermement. Elle est bien trop petite pour l’exprimer ainsi, mais sincèrement c’est un coup à se faire déboîter l’épaule. Marie n’y prête aucune attention et poursuit son objectif à grands pas (et clac et clac et clac les claquettes et frrrt, frrrt, frrrt les sandales) : se rendre au plus vite au presbytère.
La contrariété de Marie qui s’était lentement mais sûrement construite depuis plusieurs semaines s’était transformée en colère. Ses garçons, Paul et Henry, âgés respectivement de 10 et 8 ans et ayant déjà englouti deux années de catéchèse, avaient participé au mois de mai à un stage de préparation à la communion solennelle prévue le mois suivant.
Marie n’est pas particulièrement pratiquante, mais s’avoue secrètement une croyance en quelque chose, même si elle ne sait pas bien quoi. Alors les enfants sont inscrits au catéchisme et vont à la messe chaque dimanche (et l’église faisant face à la boulangerie, ils passent prendre les baguettes fraîches à la sortie de la messe, c’est bien pratique). Ils reçoivent ainsi une éducation religieuse basique, mais aux yeux de Marie, incontournable. C’est comme ça, c’est ce qui se fait, donc on le fait. Mais cette communion l’air de rien, c’est toute une organisation, alors avec deux garçons d’à peine 13 mois de différence elle a bien négocié avec l’abbé Gillet, qui a accepté que ces deux-là malgré la différence d’âge puissent faire ensemble communions et confirmations. Depuis que les garçons sont nés, Marie est adepte du deux en un : pour le quotidien tels vêtures, bains, couchers, repas, école et colonie de vacances, et pour les événements lors de remise des prix scolaires, cours de catéchisme, et autres divertissements (si on peut appeler cela ainsi, car Marie déteste tous ces moments de regroupements qu’elle vit comme contraintes et obligations sociales. Pour faire bref, ça l’emmerde).

L’abbé Gillet est au frais dans le presbytère, il range quelques papiers, trie deux ou trois livres, et sort un carton de l’armoire. Il le pose sur la table et l’ouvre pour en admirer le contenu. Des revues religieuses, des balles pour le baby-foot et des raquettes de ping-pong pour le local des ados, des porte-plume sergent-major, des boussoles de randonnées, un jeu de fléchettes, quelques lance-pierres fait maison, des livres de la bibliothèque verte et des numéros du « Club des cinq », et enfin des bonbons dont les si délicieux paquets de « mistral gagnant ». Il faudra penser à renouveler le stock, il n’a plus de petits sacs de billes et surtout commander les petits crucifix en bois, car il aime particulièrement offrir les crucifix (tiens mon petit, tu mettras ça au-dessus de ton lit, pour bien penser à Lui, même quand tu dors, et un peu à moi aussi…). Le dernier stage de « retraite avant communion » avec les enfants a fortement diminué son stock de cadeaux.

Marie progresse dans la ruelle sur un rythme assez soutenu, ce doit être sa colère qui lui donne une si belle énergie. Et Dieu sait qu’il en faut pour grimper cette foutue ruelle qui mène vers Lui, ce n’est pas une ruelle, c’est un chemin de croix ! Elle sent bien qu’elle traîne la gamine au bout du bras, mais tant pis, elle n’avance pas, elle se propulse (et clac, clac, clac, les claquettes) aidée par les mouvements de bras qui font balanciers de droite et de gauche. D’un côté, la petite à soulever ou presque à chaque pas (frrt frrrt frrrt les sandalettes sur le bitume) et de l’autre son filet à provision orange dans lequel elle a jeté deux sacs de billes neuves. Les deux garçons ont été surpris, déçus, et tristes quand ils ont vu leur mère leur arracher les deux sachets des mains (ils étaient si contents) et les poser au-dessus de l’armoire en criant : « vous n’y touchez pas, j’irai les rendre au curé ! ». Paul à discrètement tenté de s’opposer à cette décision.
« Mais maman, pourquoi ? C’est l’abbé Gillet qui nous les a donnés. Pourquoi on ne peut pas jouer avec ? »
Marie a répondu
« Parce que ! »
La véritable réponse serait plutôt :
« Parce que l’abbé vous fait venir trop souvent dans le presbytère, parce que c’est le troisième cadeau en trois semaines, d’abord des crucifix (rangés dans la table de nuit), puis des raquettes de ping-pong (on n’a même pas de table alors ça sert à quoi ?) et puis ces billes… Et puis surtout parce que vous m’avez bien dit qu’il vous caressait les cheveux et vous disait combien vous étiez beaux (ça, c’est bien vrai), et gentils (pas toujours), et des tas d’autres trucs aimables, alors ces billes c’est le cadeau de trop. Voilà pourquoi. Les billes, on les rend, et on va dire à l’abbé ce qu’on pense de tout ça ».
Ite Missa est !
Les garçons ronchonnent, l’aîné plante son regard dans les yeux de sa mère et le plus jeune a le menton qui tremble et a envie de pleurer, mais ils contiennent comme ils le peuvent un profond sentiment d’injustice sans toutefois trop la ramener, car ils savent pertinemment que Marie n’est pas du genre à supporter les lamentations ou les négociations. Très jeunes, ils ont vite compris et souvent à leurs dépens que leur mère, ce qu’elle aime avant tout, c’est la tranquillité. Et la tranquillité a un prix, et ce sont souvent les enfants qui le payent, allez comprendre…
Mais tout de même ces deux sacs de billes, les garçons les ont en travers de la gorge. Ils avaient pris soin de ne pas ouvrir les paquets avant d’arriver à la maison, mais ils avaient pu deviner au travers du petit filet coloré des billes comme on rêve d’en avoir, de celles qu’on gagne après des heures de jeux appliqués les genoux plantés dans le macadam de la cour d’école, l’autre alternative étant de se battre avec parfois des biens plus forts que soi. Et si victoire il y a, quel plaisir de sentir ces petites billes de verre au fond de la poche, et mieux encore les rouler entre ses doigts et pouvoir entendre le discret petit shriit schriit schritt quand elles se frottent les unes aux autres. Le comble de l’excitation étant la prise de risque de devoir les remettre en jeu et les gagner à nouveau, dans ce cas c’est plus qu’une victoire, c’est un triomphe. Voir les petits filets de billes toutes colorées et de différentes tailles dont au moins deux boulards, les plus grosses, les plus belles, les plus lourdes, ces petits filets, donc, posés là en haut de l’armoire sans pouvoir y toucher, sans comprendre pourquoi ils deviennent interdits est une frustration énorme pour les garçons. Comme il n’est pas envisageable de s’engager sur le terrain de la négociation avec leur mère (c’est miné, et perdu d’avance), ils se taisent et acceptent le verdict. Toute opposition entêtée à Marie se conclue par au mieux une punition, au pire par une ou deux bonnes gifles, dont on se souvient ma foi assez longtemps.
Quand Marie pousse le portillon du jardin du presbytère, elle est essoufflée et transpirante. Quelle chaleur nom de Dieu ! elle lâche la main de Madeleine :
« Tu restes dans le jardin, tu bouges pas, tu m’attends j’en ai pas pour longtemps. »
La petite est trop contente d’être enfin arrivée, cette montée marathonienne de la rue de l’église l’a épuisée. Obéissante (comme tous les enfants de Marie), elle s’assoit sagement sur le muret à l’ombre d’un figuier et se laisse bercer par le bourdonnement des insectes autour des fleurs. Marie a déjà passé la porte du presbytère et marque une courte pause : elle profite quelques secondes de la fraîcheur de l’endroit (doux Jésus que ça fait du bien) et file droit dans le bureau du curé. La porte est ouverte, il est là, de dos, en train de farfouiller dans un carton. Il ne l’a pas entendue arriver et pourtant avec ce bruit de claquettes (clac clac clac) elle n’a pas donné dans la discrétion. Il est sourd ou quoi ?
« Monsieur le curé ? »
Il sursaute et se retourne vivement, puis sourit immédiatement à la vue de Marie. Ah cette Marie, qu’elle est jolie, et gracieuse avec ça. C’est un véritable rayon de soleil. Certes, elle a toujours eu un caractère bien trempé et elle ne doit pas être toujours facile, mais elle dégage un quelque chose qui ne laisse pas indifférent, elle est comme qui dirait…. Séduisante. Et ses garçons lui ressemblent comme deux gouttes d’eau ! tellement beaux, tellement attachants.
« Bonjour Marie, qu’est-ce que…. ? »
Il n’a pas le temps de finir sa phrase que Marie lève à hauteur de son visage le filet à provision en maille déformé de ses deux sachets de billes neuves.
« Je viens pour ça ! et pour tout le reste. Je viens vous dire que vous n’offrirez plus rien à mes gamins, que vous ne leur direz plus de venir vous voir au presbytère après le catéchisme, qu’ils ne viendront plus jouer au baby-foot et au ping-pong au local des ados. C’est fini, terminé. C’est pas très sain tout ça, c’est pas très comme il faut, ça me met le doute et moi le doute j’en veux pas. »
Le curé est abasourdi, ou veut-elle en venir ? Marie ne décolère pas. Est-ce la montée de la ruelle, la chaleur du dehors ou cette histoire qui lui tourne dans la tête ? Elle est remontée comme un coucou.
« Mais enfin, Marie…
— Rien du tout ! ne dites rien du tout ! je veux rien savoir, je veux juste que mes gamins soient tranquilles. Alors ils feront la communion dimanche, comme prévu, et ensuite ils ne remettront plus les pieds à l’église. Vous comprenez ? Et les billes je vous les rends, on en veut pas ! »
Le curé reprend ses esprits (c’est pas Dieu possible qu’elle fasse un truc pareil !)
« Mais, mais…. Marie ! enfin ! reprenez-vous, que voulez-vous que… »
Elle lui coupe la parole, ce n’est pas bien poli, mais ma foi, elle ne se laissera pas faire
« Rien du tout ! je suis venue dire ce que j’avais à dire et maintenant les garçons c’est fini. La communion dimanche et voilà tout. »
Tout énervée par tout ça, et en plus avec la gamine qui attend dehors (pourvu qu’elle ne fasse pas de connerie), elle projette son bras gauche vers l’arrière et le filet à provisions emporté par l’élan et le poids des billes s’engage dans une sorte de tourniquet avec le bras faisant un rapide arc de cercle, pour passer dans son dos puis au-dessus de son épaule et dont on comprend immédiatement qu’il va atterrir d’un coup sec sur le carton à cadeaux.
Le curé est encore assez vif pour son âge et anticipe en une fraction de seconde l’incontournable choc sur le carton. Il se penche d’un coup et tend les bras pour saisir son trésor de guerre, Marie, nooooon, attention à
Il n’a pas le temps de finir sa phrase, car le filet déformé par le poids des billes prend la forme d’une catapulte de ménagère et rencontre dans un premier temps la tête du curé (pong !) pour enfin finir sa course sur le fameux carton (blang !).
Un ange passe. Marie est immobile, statufiée, et voit comme au ralenti l’abbé Gilet se redresser, et porter la main à son front. Il saigne. Éclatement de l’arcade sourcilière. C’est une petite voix qui vient de dehors qui les tire l’une et l’autre de leur perplexité. La petite Madeleine est sur le seuil du presbytère.
« Maman ? Maman ? t’es où ?
— J’arrive ». Marie sort de sa courte léthargie, extrait le filet du carton éventré, et le retourne afin que les deux sachets de billes tombent au sol (ploc, ploc)
Le curé se tient la tête à deux mains, ça pisse le sang, il n’y voit plus grand-chose. La petite Madeleine s’impatiente « Maman ? Tu viens ?
— Oui, oui, je viens. »
Avant de tourner les talons elle hésite un peu, se dit que tout de même elle y est peut-être allée un peu fort, mais une petite voix intérieure lui dit : il n’avait qu’à pas se pencher, et après tout il l’a bien mérité ! Sans un mot elle traverse le hall d’entrée, attrape la gamine par la main (aie c’est reparti pour un démontage d’épaule), traverse le jardinet et ferme soigneusement le petit portillon. Il est temps de rentrer à la maison.
Et hop, les claquettes et les sandales prennent le chemin du retour. La petite trouve le trajet plus facile qu’à l’aller, ça descend et sa mère semble joyeuse. Marie savoure, elle se rejoue la scène : le filet qui se tend avec le poids des billes et rencontre la tête du curé puis le carton qui explose, et oh mon Dieu comme c’est drôle ! Elle sourit et se met même à rire tout haut. La colère s’est totalement dissipée, a fondu comme neige au soleil, et a laissé place à une belle autosatisfaction. Ce n’est pas si souvent et ça fait un bien fou. Ce serait à refaire ? Pour sûr qu’elle recommencerait, c’est trop bon !
La petite sautille d’un pied sur l’autre et demande :
« C’était quoi maman le bruit avec monsieur le curé ? »
Marie réfléchit un court instant et répond
« Le bonheur. Le bruit du bonheur, c’est ça que tu as entendu. Allez, n’y pense plus on rentre. »

La messe de communion touche à sa fin. Quel soulagement ! nombreux sont ceux et celles dont l’esprit se tourne déjà vers la belle journée à venir (merci Seigneur), aux petits plats dans les grands, aux tables dressées dans la cour à l’ombre des arbres, aux bouteilles misent au frais dans des bassines d’eau froide, et aux petits cadeaux qui attendent les enfants. Les communiants et communiantes ont digéré l’hostie, et y’a pas à dire, ça n’a vraiment pas bon goût. Ils reprennent place les uns à côté des autres, dans un bruit confus de chaises et de bancs. Mais tout de même, Madame Rambourg continue à s’agiter sur sa chaise, tournant la tête de droite et de gauche, cherchant qui dans l’assemblée pourrait lui dire pourquoi l’abbé s’est collé un pansement au-dessus de l’œil. Pour une fois qu’il y a de quoi cogiter pendant cette foutue messe elle se réjouit d’avoir un petit quelque chose à se mettre sous la dent, ça changerait de l’hostie ! alors elle n’y tient plus et se tourne vers son autre voisine :
« Vous avez vu la tête du curé ? Il a bien un truc sur la figure, non ? Vous savez ce qui s’est passé ? »
Marie se tourne vers elle, un sourire accroché à son si joli visage et lui répond
« Aucune idée ! »


Texte sur la thématique : Les outils du bonheur (en l’occurrence des billes, mais ça peut marcher aussi avec des raquettes de ping-pong ou balles de baby-foot !)

Photo © DR.

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Ha ha ha, excellent !

Je me suis laissée guider par le rythme des claquettes et de la colère de Marie.
Son bonheur qui explose à contretemps.
Les regards en biais, les messes basses, les hypocrisies distillées savoureusement.

Merci pour ce beau moment de lecture.

J’ai adoré le style adopté dans ce texte original. C’est très visuel… et auditif !
Le caractère bien trempé de Marie est vraiment bien décrit durant la description de sa montée vers l’église.
L’expression « Aucune idée » qui clôt le texte est savoureuse.

Un texte alerte qui nous entraine avec lui. Et avec elles on gravit la côte qui mène au presbytère. Tout est bien vu, à commencer par les ragots de ces commères qui en oublient de prier. Tout se perd ! Je rejoins Betty dans son commentaire sur le caractère visuel et très auditif du texte. J’y ajoute le parfum de la baguette achetée au sortir de la messe et peut-être l’odeur des fleurs autour de Madeleine. Des odeurs non mentionnées mais qui sont là en filigrane. Et cette chute angélique !
A la première lecture, j’ai cependant trouvé quelques longueurs. Une seconde lecture a effacé cette impression.
Bravo Ketriken et merci pour cette bouffée de bonheur !

Le choix du prénom de Marie… tu me diras, j’ai bien choisi Sophie)… qui croit sans vraiment croire… finit même par se statufier… le vocabulaire est choisis avec soin, chaque rappel à Dieu est juste à la bonne place. Il y a du « comme il faut » et du ressenti contre lequel même Dieu ne peut rien… c’est frais, malgré la chaleur et plein de finesse et d’impatience… un peu long à mon goût, avec une fin qu’on imagine monter en puissance sur ce chemin de l’église, mais qu’importe, c’est que du bonheur à lire.

Je rejoins le concert de louanges, et suis d’accord avec tout ce qui est dit. Sauf sur les longueurs, du moins pas complètement. Allez je vous raconte le making off. Ketriken m’envoie un texte que, comme pour tout le monde, je soumets au correcteur, lit, relit et met en page et illustre. Et enthousiaste, je lui dis qu’il est super. Et là après lui avoir envoyé, je découvre qu’il y a un second mail, avec une autre version, légèrement plus longue ici et là…. Je me suis dit : « elle va me prendre pour un vil démago puisque je lui ai écrit à partir de la première version ». Eh bien non : la deuxième me plait aussi autant (et je n’y trouve pas tant que ça de longueurs)… mais tout cela pour dire Ketriken… que la version précédente était suffisante. À méditer. Si vous dites vous-même que vous ne parvenez pas à cesser de rajouter des couches… Certaines sont peut-être inutiles (mais c’est dur de corriger ce travers quand on l’a, je suis pareil). La leçon vient peut-être de ce que faisait Raymond Carver : lui, il coupait toujours et toujours… (ou c’est son éditeur qui le faisait).
Là, ce texte savoureux, tonique et jubilatoire des bonheurs ultimes de se faire justice et de savourer en ronronnant son propre secret est vraiment réussi. Mention spéciale aux effets acoustiques et visuels…. et au croquage de milieu social. Bravo !

Sacré texte. Et le coup du sac de billes est bien trouvé. J’aime tout particulièrement les clac clac et les frrr frrr qui a eux seuls campent bien le décor. L’ambiance de la messe est très bien rendue. On s’y croirait. Et puis, il y a quand même ce doute qui plane sur ce que fait le curé aux enfants. On voudrait espérer qu’il aime les enfants pour ce qu’ils sont et qu’il leur fait des cadeaux juste pour être gentil avec ses petits catéchistes mais bon la phrase sur les petits crucifix est quand même explicite.
En tout cas, tout cela est bien enlevé et bien vu!