Ateliers d’écriture créative, de fictions, animés par Francis Mizio

Auteur/autrice : Ketriken

Texte de Ketriken – « Le foulard rouge » *

Il est temps de partir. Elle glisse les pieds dans ses sandales en se tenant au chambranle de la porte d’entrée et s’accroupit pour attacher les boucles autour de ses chevilles. Elle se relève trop vite et est prise d’un léger vertige. Elle se rattrape au mur et respire un bon coup. Elle a un peu trop bu hier soir, elle le regrette amèrement ce matin.
Elle s’aperçoit dans la glace, elle a des cernes sous les yeux et les joues blafardes.
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Texte de Ketriken – « Le bruit du bonheur » *

L’église du village est pleine à craquer. Certes, elle n’est pas très grande, mais en ce 12 juin 1965, c’est jour de communion. Tous les paroissiens sont là qu’ils aient ou pas des enfants en âge de recevoir les saints sacrements, car on fête Dieu, on Lui confie l’âme des enfants (une fois de plus, car il y a déjà eu le baptême tout de même, mais c’était il y a longtemps, ça peut pas faire de mal de Lui refaire un petit signe…) et cerise sur le gâteau on est invité chez les voisins ou dans la famille pour faire bombance. Chacun et chacune s’est endimanché, a glissé le vieux missel dans le sac ou au fond d’une poche de veste, a bien vérifié disposer de quelques pièces de monnaie pour la quête, et c’est parti pour une belle journée à ne rien faire. Merci, mon Dieu, merci !
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Texte de Ketriken – « Tout ça pour ça » *

16H30 : Toute la classe des CM2 s’est vidée aux bruits des chaises tirées sur le sol, des cartables trainés sur les tables avant d’être calés sous le bras, des godillots trop lourds et trop chauds en cette saison.
Hormis Pascal Borel, Denis Ouvrard, et Henry Maillard, tous les garçons accrochent rapidement et n’importe comment leurs blouses uniformément grises aux porte manteaux de l’entrée et s’ébrouent comme des jeunes chiots dans la cour. Certains jouent la prolongation pour une dernière partie de billes sous le préau, d’autres se bousculent sans ménagement, et quelques uns traversent la route pour aller jouer sur le parvis de l’église qui est juste en face de l’école de garçons. Tous savent qu’il est dangereux de traverser à cet endroit précis. École et église sont au cœur du bourg, juste dans le virage en épingle à cheveux. Elles se font face et semblent s’accorder pour absorber alternativement leurs lots d’enfants : école, catéchèse, messes, communions…. à croire que curés et instituteurs s’organisent secrètement pour ne laisser aucune place à la liberté de jouer, voire même la liberté de penser !
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Texte de Ketriken – « Une balle, une seule » *

Il s’organise mentalement pour s’isoler du capharnaüm ambiant. Il fait progressivement abstraction des lumières artificielles et des bruits, des odeurs et des couleurs et du mouvement continu de la foule. Il fait aussi abstraction de ses préoccupations ou obligations, veut oublier sa culture de tabac à confier à la SEITA, son tracteur qui tousse un peu, voire un peu trop, la météo peu clémente aux cultures et les arrosages presque continus, et son chien, son pauvre vieux chien couché dans la grange sans grand espoir qu’il se relève dans les heures à venir. Il se centre sur lui-même, seulement lui et rien d’autre, et enclenche le processus de concentration nécessaire à ce qui doit arriver dans la minute à venir.
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Texte de Ketriken – « Le carnaval et le temps des fous » *

Philippe regarde attentivement une reproduction de dessin posée sur la table de cuisine : un âne et son cavalier le chevauchant à l’envers. Il la prend et la tend à Francis qui, lui, regarde attentivement les bouteilles posées sur le plan de travail et se demande bien laquelle il va ouvrir : Anjou ou côte de Provence ?
« C’est quoi ce type assis à l’envers sur un âne ? tu as décidé de te lancer dans les dessins pour livre d’enfants ?  »
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Texte de Ketriken – « Schlim, sa mère, et Gengis Khan » *

 » Monsieur Cohen, notre dernière séance date d’il y a … cinq mois environ, non ?
– Oui, c’est ça , c’était en mai.
– Vous aviez, si ma mémoire est bonne, un éventuel projet pour l’été. Un voyage en… Asie ? un cadeau de votre mère, je crois.
– En Mongolie exactement.
– Oui, je me souviens que nous avions longuement échangé sur les ruptures, l’éloignement, la distanciation avec les habitudes, la capacité au refus, blablabla. »

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Texte de Ketriken – « L’oubli » *

Christine revient de la cuisine une bouteille dans une main, un torchon dans l’autre, et remplit les verres vides en maugréant.
– «… On a bien le temps de reprendre une coupe, Laurent ne va plus tarder à arriver, on va attendre encore un peu, de toute façon depuis qu’il travaille aux urgences il n’est plus jamais à l’heure nulle part, mais ce n’est pas grave car l’osso bucco plus ça réchauffe et meilleur c’est et.. ohhhh devinez qui j’ai revue dans le quartier la semaine dernière ? Patricia. Patricia ! Madame Parfaite !
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Texte de Ketriken – « Maria » *

Ça devait se terminer comme ça, c’était prévisible, et bien que George se soit représenté cette scène à de multiples reprises, il n’en était pas moins dépité. Il avait même secrètement espéré que ça se termine plus tôt, que les choses aillent plus vite, si seulement cela n’avait tenu qu’à lui …. Mais non, Maria avait pris tout le temps qui lui convenait, envers et contre tout, envers et contre tous car c’était une vorace, éprise de liberté, obstinée, farouche et sauvage  à toujours vouloir plus, plus vite, plus fort, plus loin.

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Texte de Ketriken – « L’enrubanage » *

« Et cette petite caisse là ? c’est pas la même que les autres, il n’y a pas de nom, tu sais ce qu’il y a dedans ? »
Bertrand et marc sont dans la cave et ouvrent quelques caisses en bois à la recherche d’une bonne bouteille pour le repas du soir, et la cave de la maison de famille est particulièrement bien fournie, il n’y a que l’embarras du choix.

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