Texte de Fleurbleue

Nora s’était une fois de plus réveillée en sursaut, s’extirpant avec peine d’une nouvelle crise d’angoisse nocturne. Cela durait depuis dix jours déjà.

La sensation de la certitude intense et déraisonnée de sa mort prochaine;

Elle était pourchassée par une meute d’animaux sauvages qui en voulaient à sa vie jusqu’à ce qu’elle se jette dans un ravin pour leur échapper.

Elle se réveillait tremblante et transpirante, la respiration bloquée et des douleurs indescriptibles dans son ventre.

Elle se tourna a chaque fois vers Dahi son époux depuis 13 ans, et vit qu’il dormait à poings fermes.

Cartésien, occupé à améliorer le confort de sa famille, et a réussir sa carrière, elle ne se sentait pas le courage de lui parler de ses craintes.

A ses yeux, leur vie était une réussite ; Belle maison, belles voitures, deux beaux enfants, un couple heureux et envie, carrières prometteuses, l’argent ; ils avaient tout reçu. Elle était médecin. Le rêve de sa vie

Elle avait honoré le rendez vous fixe par ses parents et y était parvenue bien plus haut qu’ils ne l’avaient espéré

Ils étaient en 1995. A cette époque là, il jouait dans l’équipe de basket de cette université. Elle s’en souvenait comme si c’était hier. Et bien que ses rêves se soient progressivement étiolés le long du chemin, ses souvenirs étaient restés intacts ;

Quant a elle, Sa voix était toute tracée, son père avait pris rendez avec la profession de médecin pour elle oubliant que l’on ne prend pas rendez avec le destin qui dans sa souveraineté choisit qui il veut et l’y mène la ou bon lui semble.

Elle vivait en ermite et passait ses journées à la bibliothèque ou dans sa chambre à étudier.

C’est lors d’une de ses après-midi au sein de la bibliothèque qu’elle l’avait vu apparaitre.

Il avait cherché un livre entre les rayons et était revenu s’asseoir tout près d’elle en silence jusqu’à ce qu’il fut l’heure de fermer la bibliothèque.

Et puis arriva ce moment, Il faisait une nuit glaciale. Décembre.

Il murmura des mots qu’elle eut du mal à saisir et elle n’essaya même pas de les lui faire répéter. Ils échangèrent des mots. Et ils se revirent chaque soir a la bibliothèque.

leurs histoires leur parurent si similaires qu’une évidence s’imposait. Ils avaient rendez vous. Un nouveau rendez fixe par la vie.

Ils suivraient donc le chemin qui était le leur. Quelques années plus tard ils unirent leurs destins devant leurs familles et devant Dieu.

La venue de deux enfants beaux n’avait fait qu’accentuer la certitude que ce qu’ils vivaient était écrit ;

Tout cela remonte a bien longtemps pensa NORA qui n’avait pas entendu son époux et ses enfants s lui souhaiter en chantant un très bel anniversaire ;

Elle sorti brusquement de sa reverie, et se souvint que le jour était son jour, et elle sourit aux siens avec bienveillance et gratitude.

Ils étaient le 1er juillet 2005 et elle venait d’avoir 45 ans et elle ne sut pas dire si elle en était heureuse ou pas. Et pourtant à l’évocation de son âge, elle ressentit une nouvelle fois cette difficulté a respirer.

Premier jour du mois. Et ses pensées s’arrêtèrent sur le chiffre 1 ; Le commencement de tout ; Oui tout était encore possible. Le chiffre 1 est la brique de vie. La brique d’un nouveau départ.

Elle pensa à son prénom que sa mère avait choisi. Lumière et liberté étaient les mots clés qui s’y attachaient. Et pourtant, Il lui sembla a cet instant qu’on lui avait vole son éclat sa vie durant.

Elle pensa subitement à ses parents, et la sonnerie du téléphone retentit. C’était eux.

En ce moment, elle comprit. Et cela lui vint naturellement.

Elle n’avait ni amertume ni rancœur, mais elle suffoquait depuis 45 ans dans cette vie trop parfaite.

Elle devait vivre écrire sa propre histoire. Répondre a l’appel de la vie.

C’était un mercredi. Il fallait se lever. Accomplir son devoir.

D’un pas ferme, elle sorti de la maison et prit sa voiture.

Elle pensa à ses enfants mais l’urgence de sa survie résonnait trop fort en elle

Elle appela Hope, l’amie de toujours.

Hope ne jugeait jamais. Elle n’exigeait rien. Elle était juste la avec bienveillance et amour.

Hope l’écoutait en silence bien que bouleversée par son récit.

Et quand Nora éclata en sanglots, Hope lui dit ces mots d’un écrivain qui la touchait profondément

«Où s’achèvent les rêves, où commence le réel? Les rêves proviennent de l’intérieur, ils arrivent, goutte à goutte, filtrés, depuis l’univers que chacun de nous porte en lui … y a-t-il quoi que ce soit qui ne se transforme pas …celui qui ne change pas ment au monde.»

Nora raccrocha apaisée. Il fallait trouver les mots pour annoncer a sa famille ce soir au diner qu’elle les quittait et qu’elle abandonnait même son travail ;

Elle sut que la journée serait interminable mais elle pouvait déjà entrevoir les étoiles dans cette nuit noire ; Elle sentait souffler la brise légère de la vie.

Par Fleurbleue

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On pourrait presque rapprocher un peu le texte de Fleurbleue de celui de Schiele. D’une manière très différente, certes, Fleurbleue nous parle aussi, ici, d’une attente. Sauf que cette attente a duré toute une vie, et que son héroïne n’a, pendant longtemps, pas eu forcément conscience d’attendre quelque chose… Il a fallu cette angoisse de mort, bien décrite au début du texte, pour qu’elle prenne conscience que quelque chose clochait. C’est un suspense de « renaissance », en quelque sorte, que Fleurbleue met en scène. On sent dès le départ que ce texte parti pour nous retracer quasiment toute une vie va nous amener à un retournement de situation à un moment. Il reste à savoir lequel. Et s’il n’est pas forcément « hyper surprenant » (la thématique du changement de vie radical est une thématique fréquente, mais porteuse), il est plutôt bien amené, dans une certaine fluidité de narration. Comme Schiele aussi, Fleurbleue ne nous raconte pas ce qui se passera après cette attente, et à juste titre : ce serait une autre histoire, et ce n’est pas celle qu’elle a décidé de nous raconter. Libre au lecteur d’imaginer la suite qu’il veut, ce qui est plutôt agréable !

Petit détail technique : tu évoques deux dates (1995 et 2005), séparées de 10 ans. Or dans ton texte, il semble que ce soient deux moments séparés de bien plus de 10 ans (entre l’université et l’anniversaire de ses 45 ans… Ou alors il y a autre chose ?). Du coup ça m’a sortie du fil de ton texte, j’ai dû relire plusieurs fois, recompter… C’est un détail, mais c’est mieux si on s’y retrouve spontanément à la lecture ! Sinon, il me semblerait pour ma part intéressant que tu utilises davantage, au fil de ton texte, cette idée initiale de l’angoisse/du cauchemar de mort. Que ça revienne, par petites touches, mais sans cesse, comme un truc entêtant, lancinant. Tu précises au départ que ses crises d’angoisse durent depuis 10 jours, reviennent : je crois que ce serait plus fort si tu le mettais en scène vraiment, dans ton texte. Une phrase par ci (« elle a du mal à ne pas entendre en boucle, dans sa tête, les cris des animaux furieux qui la poursuivent »), une phrase par là (« elle ressent presque physiquement la chute dans le ravin, son corps qui rebondit contre les parois »), qui rythmerait la narration et qui rappelleraient sans cesse cette angoisse qui l’étreint (et nous la ferait partager davantage, en faisant aussi monter encore plus le suspense, car on se demanderait si elle va vraiment finir par mourir ou… ?). Bien sûr, je ne te donne que de simples exemples, à toi de trouver ce qui te convient comme phrases et comme rythme ! Mais je pense que tu donnerais encore plus d’épaisseur à ton texte avec ce genre de rajouts.

Merci pour ce joli texte Fleur Bleue, un texte qui est venu me toucher car je me suis reconnue un peu dans cette thématique, mais différemment. J’ai aimé la description de ces années et même si elle ne regrette rien cette femme découvre qu’il est temps pour elle de découvrir autre chose, de ressentir des émotions autres, d’expérimenter tout simplement la vie, dans ses joies, ses épreuves. Une vraie remise en question pour elle qui vivait finalement dans une « cage dorée ». C’est très courageux de tout lâcher ….. mais parfois c’est essentiel.

l’histoire des dates ne m’a pas gênée car j’étais emportée dans l’histoire , me demandant si elle allait se foutre en l’air ou pas. il y a de jolies formules dans ce texte, c’est à la fois doux et âpre, comme la vie 🙂

C’est un texte qui respire la vie, qui emporte.
Je rejoins Gaelle, j’ai eu quelques difficultés au niveau temporel, il m’a fallu relire ton texte.
Sinon j’ai aimé le choix des prénoms, en particulier Hope pour la confidente 🙂

Joli texte qui fait résonner pas mal de choses. J’aime bien le fait de ne pas savoir pendant le texte si elle va tout plaquer où se suicider comme l’évoque Schiele. Cela permet de mieux ressentir son mal être. Elle choisit en fait la vie mais comme l’indique Gaëlle, entrecouper par touches subtiles ton texte avec quelques allusions à la mort rendrait ton héroïne encore plus réelle. J’aime bien l’idée de ne pas savoir la suite. La description de sa vie et la réflexion de Nora forment déjà toute une histoire

Je suis d’accord avec toi, Pily. La structure du texte, ici, n’incite pas à ce que l’on connaisse « l’après ». On pourrait sans doute l’imaginer, mais ça devient un roman, alors, ce n’est plus un texte court. 😉

Peut-être est-ce la quarantaine… mais je pense que ce texte peut parler à beaucoup d’entre nous. Je me suis inquiétée aussi de savoir si elle n’allait pas choisir une solution plus extrême… pour finalement la trouver courageuse de tout oser lâcher. Pour une autre vie que, curieuse comme je suis, j’aimerais bien connaître. Mais c’est vrai que cela serait une autre histoire…