Ateliers d’écriture créative, de fictions, animés par Francis Mizio

Catégorie : CatFev2018

Retour sur l’atelier 1 de février : « Pourquoi ? / Pourquoi pas ? »

« Pourquoi ?/Pourquoi pas ? », cette proposition pour ce premier atelier de février 2018 aura permis la naissance de textes aux tonalités décidément diverses : des nouvelles très émouvantes, très proches du récit de vie, inspirées sans doute des existences même de leurs auteur(e)s, un beau poème, et une fiction historique d’un genre éloigné des autres productions, virile et guerrière, où la question de l’engagement est minutieusement scénarisée.
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Texte de Ptiteco – « Et un jour on respire à nouveau » *

Ces mots prononcés par les neurologues dans cette pièce blanche et froide résonnaient encore en lui : « maladie grave », « incurable », « quelques mois tout au plus ». Ils leur avaient annoncé cela un peu comme quand on annonce le gagnant d’un prix, en y mettant les formes, en jouant sur un drôle de suspense : « au vu de l’évolution des examens de votre épouse », « compte tenu des observations cliniques », « nous nous sommes réunis pour évoquer son cas », « et aujourd’hui nous pensons que malheureusement…»
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Texte de Clovis – « Kerkoporta »

Kassianos se retourna sur sa couche et remonta la couverture sur ses épaules. L’aube n’était pas encore là mais il n’avait plus sommeil. Il avait hâte de retourner à son poste. Voilà plusieurs jours que rien ne s’était passé et il s’impatientait. Qu’attendaient donc ces maudits ottomans pour attaquer ? Des jours durant, il montait la garde sur le mur extérieur, scrutant l’horizon dans l’attente d’un mouvement de troupe. À ses pieds, les soldats ennemis attendaient leur heure par dizaines de milliers. Dans sa tente, le sultan et ses généraux guettaient le bon moment. Persuadés de leur propre supériorité, ils cherchaient la faille dans des remparts qui avaient résisté à plus de mille ans de siège. « L’orgueil des musulmans n’avait décidément aucune limite » pensa-t-il et un sourire étira ses lèvres.
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Texte de Melle 47 – « L’infini des possibles… » *

Au bout d’une plage, quelques rochers polis, abandonnés par les vagues. C’est marée basse. Pas une mouette. Pas de coucher de soleil flamboyant. Pas de ciel bleu. Juste une mer triste qui joue mollement du bout des vagues avec l’écume indolente, sous un ciel gris-bleu où s’ennuient quelques nuages. À moins que ça ne soit l’inverse, finalement haut, bas, tout s’assemble, et se ressemble.

Je m’assieds sur un gros rocher, resserre mon gilet couleur pierre mouillée, entoure mes jambes et pose mon menton sur mes genoux. J’ai froid, j’ai toujours froid. J’aime ces instants de calme où les souvenirs remontent doucement. Aujourd’hui, c’est mon Papeil qui s’invite dans ma bulle. Mon grand-père à moi, de son vrai nom Henri, était un grand homme aux cheveux blanchis mais toujours impeccablement coiffés en arrière. Une tête bien droite. Un regard perçant au-dessus d’un puissant nez d’aigle. Un homme impérieux, intègre. Un forçat du barreau qui ne s’exprimait jamais que dans un français hors d’âge, bourré d’adjectifs ponctuant de longues phrases compliquées, comme si chaque conversation, même banale, était une plaidoirie.
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Texte d’Ademar Creach – « Recto verso »

Enfant

Une maison blanche, entourée par un jardin dans un lotissement d’un certain standing, dans une petite ville de province. Une famille normale, les deux parents professeurs. Une vie lisse, où rien ne dépasse. L’école publique, les amis de la famille – dont les parents sont aussi enseignants, ou médecins – de bonne compagnie. Aller voir les grands-parents lors de chaque vacances scolaires et réserver quinze jours au mois d’août dans le même camping au bord de la Méditerranée. C’était son enfance. Et elle lui convenait. Ou plus exactement, elle n’en connaissait pas d’autres et ne se posait pas de questions. A son âge, entourée de ses doudous et de ses livres, elle suivait le mouvement, sans poser de problème : de bonnes notes à l’école, un peu de solfège, un peu de danse, surtout pour faire comme les copines. Pourquoi pas ?

Une maison blanche, entourée par un jardin dans un lotissement d’un certain standing, dans une petite ville de province. Une famille normale, les deux parents professeurs. Une vie lisse, où rien ne dépasse. L’école publique, les amis de la famille – dont les parents sont aussi enseignants, ou médecins – de bonne compagnie. Aller voir les grands-parents à chaque vacances scolaires et réserver quinze jours au mois d’août dans le même camping au bord de la Méditerranée. C’était son enfance. Et elle s’ennuyait. Même toute petite, elle se demandait quand quelque chose allait arriver. Alors, elle essayait de provoquer par petites touches : elle montait aux arbres, d’où généralement elle dégringolait, ce qui occasionnait quelques passages aux urgences. Elle recueillait le chien errant du quartier. Elle dessinait partout, y compris sur les murs.
Pourquoi ?
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Texte de Mélanie – « L’éveil » *

Il est treize heures lorsque j’insère la clé dans l’orifice de la serrure. Le vestibule sombre m’apparaît soudainement étranger. L’air qui y flotte s’est densifié. L’ambiance est lourde. Je pénètre dans le salon pour alléger mon malaise. Les photos encadrées qui ornent le col de la majestueuse cheminée de pierre m’apparaissent en filigrane ; arrière-plan figé d’une vie en apparence parfaite. Le vent qui souffle à l’extérieur est si puissant qu’un monticule de cendres entassé dans l’antre du foyer se met soudainement à tourbillonner. L’image d’un colombarium me vient à l’esprit. Ce signe qui m’est destiné dissipe mes doutes. Avec assurance, je craque l’allumette qui modifiera le cours de mon existence. La flamme orangée fusionne avec un coin du papier photo glacé que j’ai libéré de son cadre. Les couleurs chaudes créés par le feu ravivent son teint pâle. Sa jupe terne trop ample pour elle fond lentement jusqu’à son sexe, la rendant presque sensuelle. Une minute s’écoule avant qu’elle ne soit entièrement consumée. Je balance la poussière grise de ses restes sur le monticule de cendres déjà existant. Le cœur léger, je me rends à la cuisine pour rincer les traces de mon crime qui subsistent sur mes phalanges.

Salomé n’est plus. Une nouvelle vie débute pour moi.
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Texte de Lulu – « Aujourd’hui peut–être… » *

Aujourd’hui peut–être…
C’est un après-midi d’automne.

Ciel bas, bourrasques, froid humide qui pénètre jusqu’à l’os et fait refermer autour de soi l’imperméable.
Il va faire nuit tôt.

À cette heure-ci, la place est vide. Les petits enfants font la sieste, leurs nounous s’assoupissent devant un café. Les autres sont à l’école, au lycée, au travail.

Seule une jeune fille est là, présence incongrue. Peut être l’absence du professeur l’a-t-elle libérée de son ennui mathématique.

Elle est assise sur le banc humide. Tranquillement adossée, ses mains inoccupées gisent sur ses cuisses ; ses pieds battent on ne sait quel rythme…
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Texte de Marine – « L’avant, l’après » *

J’étais prise dans une spirale infernale. Le temps filait. Et ces réflexions comme une ritournelle dans ma tête, «Je n’ai jamais assez de temps. Le temps passe trop vite. Je cours après le temps ou est-ce le temps qui court et je ne suis pas assez rapide pour le rattraper !? » . Salariée, mère célibataire, amoureuse à mes heures perdues et il y en avait peu ! La maison à tenir, ranger, laver et recommencer. Les devoirs à faire. Penser à remplir le frigo, préparer les repas, manger, débarrasser et recommencer. Lire les histoires d’avant le gros dodo de la nuit, câliner ou gronder selon… du coup, câliner à nouveau pour ne pas s’endormir fâché… Et enfin se poser. S’endormir devant la télé ou la tête dans le livre de chevet. Ouvrir un œil, se demander où l’on est, éteindre la lumière et aller se coucher et tout recommencer !
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Proposition 02/2018 – 1

Il y a plusieurs années ma compagne a acheté une automobile d’occasion. Jusque là rien d’extraordinaire, sauf qu’il y avait un vice caché : un disque de Vanessa Paradis, bloqué dans l’autoradio, et totalement impossible à déloger (ce n’est pas faute d’avoir essayé). Il se passe que l’on n’aime pas particulièrement —au mieux on la subit— l’œuvre chantée de Mme Paradis. Il se passe que parfois on démarrant la voiture, parce qu’on a dû effleurer un bouton de l’appareil, le CD se déclenche tout seul sur la dernière piste écoutée et, forcément, illico interrompue précédemment.
C’est, à vrai dire, exaspérant. Et c’est ainsi qu’il se passe que la Paradis, ben oui, est… infernale.
Un jour, de guerre lasse, la Paradis ayant gagné par usure, j’ai décidé d’écouter l’album de variétoche en entier, et là surprise : j’ai découvert qu’il y a une bluette que j’aime bien, car je la trouve plus écrite, plus intéressante dans ses mystères, ses images, ses évocations, ses ellipses que les autres qui sont un peu trop variét‘ tout de même.

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